Comment accompagner le délitement de notre paradigme économico-industriel.
Il est fait ici l’hypothèse que la thèse défendue dans ce blog est vraisemblable (voir le blog précédent). Rappelons que cette thèse prétend que le délitement de notre paradigme économico-industriel ne peut plus être empêché par une quelconque organisation nationale ou internationale, voir le blog du 13/03/23. Afin d’éviter un chaos social généralisé, cette thèse suggère que chaque nation devrait trouver sa propre solution pour d’une part retarder le plus possible le délitement annoncé, tout en se préparant à une transition vers un nouveau paradigme plus en accord avec les lois de la Nature, les besoins fondamentaux de sa population et les ressources locales à disposition.
A mes yeux, il vaudrait mieux commencer à chercher des solutions locales, voire très locales, par exemple au niveau d’une commune ou d’une région restreinte.
Alors qui, mieux que quiconque, pourrait trouver pour sa communauté une manière d’exister qui soit à la fois pérenne et satisfaisante pour tous ? Eh bien les individus eux-mêmes, à condition qu’ils remplissent au moins les cinq conditions suivantes :
- La communauté doit avoir une connaissance suffisante du problème global pour guider les solutions locales. Elle doit être parfaitement consciente de la nécessité et de l’urgence du changement.
- Les individus de la communauté doivent apprendre à se faire confiance mutuellement et pratiquer l’art de la communication (voir blog du 18/05/23).
- La communauté doit être capable de s’organiser pour adopter un mode d’existence simple, mais non rustre. Nous en reparlerons plus tard. Cela signifie, entre autres, qu’elle devra utiliser en priorité ce qu’elle a, là où elle est, et tendre vers l’autosuffisance en matière de nourriture, d’eau potable et d’énergie. Elle est tenue d’adapter sa population à ses ressources renouvelables et non le contraire comme actuellement. Le contrôle des naissances et le contrôle des flux migratoires seront les principaux outils du contrôle démographique. Les échanges de biens et de services avec les autres communautés se feront selon le principe du commerce équitable. Aucune communauté ne doit se sentir lésée ou exploitée, gage d’une diminution des risques de conflit entre elles.
- Les décisions concernant l’organisation et le fonctionnement de la communauté devraient être prises selon les principes d’une démocratie directe améliorée afin de se protéger des despotes et des manipulateurs. Nous en reparlerons aussi plus tard
- La communauté devrait recevoir de la part du pays qui l’héberge le droit de s’organiser elle-même, tant au niveau économique, législatif que culturel. Elle devrait recevoir de la part du pays hôte, protection et collaboration. En retour la communauté devra s’assurer qu’elle ne met pas en péril la solidité du pays qui l’héberge.
Passer du paradigme existentiel actuel à un beaucoup plus simple, mais non rustre est-il concevable ? Je le crois et je l’espère. En effet, n’avons-nous pas, une fois au moins dans notre existence, observé que plongé dans un milieu inhabituel, notre comportement changeait complètement, au point de ne plus nous reconnaître nous-mêmes ? Ainsi, nous sommes en droit de postuler que, immergé dans un type différent d’environnement social et sociétal, l’individu penserait et agirait différemment.
La confiance faite ici à un groupe humain tient en bonne partie dans des observations que nous avons tous faites.
L’histoire nous montre que le génie humain est tel que, placé dans des situations absolument nouvelles et difficiles, ce dernier est capable de résilience et de trouver des solutions techniques adaptées à la situation.
Nous avons aussi tous remarqué que :
=> Il est plus facile d’accepter les inconvénients issus de nos propres décisions que celles venant d’autrui.
=> Il est plus facile de s’intéresser au fonctionnement d’un groupe, d’une aventure ou d’une expérience si nous en faisons directement partie.
=> Il est moins tentant de tricher, comme il est plus facile de pratiquer l’autodiscipline, quand nous avons la confiance de l’autre et qu’il existe un sentiment de respect mutuel. Cela sous-entend que pratiquement tout le monde se reconnaît comme faisant partie de la même communauté.
=> Il est plus facile de suivre des règles si nous avons été impliqués directement dans leurs élaborations.
=> Il est plus facile d’interpréter les discours, les promesses et les engagements de quelqu’un que nous connaissons personnellement, et à qui on peut s’adresser directement, plutôt que ceux d’individus, de meneurs que nous ne connaissons qu’au travers des médias, mais qui nous restent parfaitement inaccessibles.
=> Il est plus facile de s’intéresser à son travail quand nous connaissons et acceptons son but. Les conflits dans le travail seront diminués si l’échelle de valeurs entre différentes activités professionnelles l’est aussi. Par exemple, il n’y a aucune raison de faire une différence de valeur entre un travail intellectuel et un travail manuel. Il y a par contre une différence importante entre un travail bien fait et un travail volontairement négligé.
=> Il est beaucoup plus facile de travailler quand la confiance règne entre collaborateurs et responsables, quand nous sommes fiers du résultat et qu’en retour nous recevons, en plus de notre salaire, la reconnaissance morale du travail bien fait. Le travail qui occupe une très grande partie de notre existence, doit être amélioré constamment, non pas pour satisfaire les exigences d’un chef ou dans un but purement mercantile, mais pour la seule satisfaction du travail bien fait. Ceci est valable pour tous les métiers, chacun ayant sa place et son utilité dans une société harmonieuse.
=>Il est plus facile de pratiquer la démocratie directe au sein d’une société restreinte, fonctionnant selon des règles simples, compréhensibles par tous ses membres, que dans une vaste société complexe.
=> Les risques de conflits internes et externes se minimisent quand, dès le plus jeune âge, il nous est enseigné le respect de tous êtres et de toutes choses, la tolérance, et la diversité des comportements, sans toutefois qu’il y ait confusion entre permissivité et laxisme.
Dès lors, on peut admettre que si nous laissons un petit groupe de la population générale trouver ses propres solutions pour survivre, elle les trouvera.
Alors comment s’organiser au niveau de la nation ?
Quand l’ensemble de la population aura pris conscience que son paradigme existentiel risque de se déliter plus ou moins rapidement, elle sera plus encline à se préparer à un autre style de vie. A ce moment, les gouvernements de chaque nation pourraient inviter toutes les communes ou groupes de populations volontaires à participer à une expérience de transition de paradigme. Pour distinguer ces communautés des autres, nous pourrions leur donner le nom de CEREMOVI qui signifie « CEllule de REcherche d’un MOde de Vie ». Ces cellules seront formées par une petite population d’une région donnée, chargée de réorganiser leur société en une existence peu complexe, qui soit à la fois durable, compatible avec les exigences de la conservation de la biosphère et d’une qualité d’existence qui ne tiendra qu’à l’imagination de ce groupe.
Dans leur phase initiale, les CEREMOVI devraient être considérées comme des laboratoires de recherche, à la fois d’utilité publique et mondiale, pour la sauvegarde de notre espèce et d’une forme de civilisation. Pour cette raison, elles devraient être mises sous la protection de leur pays hôte. Probablement qu’au début, seul un petit nombre posera sa candidature. Ce sera la responsabilité des premiers CEREMOVI de démontrer que leur qualité de vie est supérieure à celles de nos sociétés complexes pour encourager la croissance de telles cellules.
Le cahier des charges sur les droits et devoirs des CEREMOVI envers le pays hôte devraient être débattus, avant leur création. Il est à espérer que les problèmes juridiques, économiques et législatifs, qui leur seront obligatoirement associés, ne poseront pas de problèmes techniques insurmontables. Nos sociétés semblent parfaitement rompues à ce genre d’exercice. Tout va dépendre de la volonté politique et de la population générale de bien vouloir jouer le jeu. Afin que l’idée des CEREMOVI soit mise en pratique avec quelques chances de succès, il est absolument obligatoire que des travaux préliminaires, avant leur lancement à grande échelle, soient organisés et que des CEREMOVI-pilotes soient testées. Chaque participant à une CEREMOVI devra être largement informé sur le comment, le pourquoi, leurs droits, leurs devoirs, leurs garanties, et comment seront organisées leur CEREMOVI.
Voilà, ceci est juste une piste de ce qui pourrait être fait mais, certainement qu’il y a encore bien d’autres. Celle-là à l’avantage d’être peu coûteuse et réversible au cas où ce serait un échec. A vous les nouvelles générations à faire des propositions faisables. Il y a un point auquel nous ne pourrons échapper : les organisations sociétales du futur devront obligatoirement passer d’un mode d’existence complexe vers un mode d’existence simple qui n’est en aucun cas un retour vers l’Age de la Pierre comme certains aiment à le dire. Devons-nous être effrayé d’un mode de vie simple ? C’est ce que nous aborderons dans le prochain blog.
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