Avons-nous une thérapie systémique applicable mondialement à proposer pour éviter le pire ?
Nos activités sont influencées par notre façon de penser. Si, comme je le soupçonne, c’est l’ensemble des activités humaines passées et présentes dans le monde qui serait responsable des changements climatiques, de la perte de la biodiversité et de l’épuisement des ressources nécessaires à la survie de notre civilisation alors, quoi qu’il arrive, nous devrions changer notre façon de penser de grès ou de force. La question est maintenant la suivante : est-il possible, au niveau mondial, de contrôler et orienter dans la bonne direction notre façon de penser et donc d’agir ?
J’en doute fortement et je vais m’en expliquer.
Tous les « manipulateurs de cerveau » savent que ce dernier est extrêmement influençable et versatile. Notre cerveau préfère croire que réfléchir, car croire demande moins d’énergie. Ce n’est pas un défaut. Ce n’est que la constatation, qu’à moins de circonstances particulières, tout être biologique tend à économiser au maximum son énergie endogène. Croire est un acte de foi qui ne se discute pas. La plupart du temps, cet acte de foi est pris non pas après un effort de réflexion, mais simplement par mimétisme. L’idée est que, si tout le monde croit en quelque chose, alors ce quelque chose doit être juste. Ainsi, par esprit d’économie de son énergie endogène et/ou par mimétisme, l’Homme s’en remet facilement à ce qu’il croit être un leader charismatique, même si ce dernier promet des choses irréalisables, pourvu qu’elles correspondent à l’attente de leurs prosélytes.
Si croire demande peu d’énergie endogène, réfléchir en demande beaucoup. Pas de réflexions sérieuses sans s’instruire, sans chercher les bonnes sources d’informations, sans faire l’effort d’observer, de communiquer, d’écouter, de comparer. De plus, réfléchir conduit au doute et à l’humilité, car en particulier pour des problèmes difficiles et complexes comme celui qui nous occupe ici, il est rare qu’il n’y ait qu’une seule vision, qu’une seule interprétation, qu’un seul remède correct. Le raisonnement logique trouve vite ses limites à cause du flou inhérent à tout système complexe (voir le blog du 16 novembre 2022). Pour bien réfléchir, il faut aussi que le cerveau soit en complète relaxation. Il ne doit pas être sous le joug des préjugés ou des superstitions, de l’espoir ou de la peur1. Il en va de même pour se comprendre et communiquer (voir l’annexe E de mon livre). Malheureusement notre civilisation ne fait que stresser nos cerveaux rendant impossible toute saine réflexion.
En effet, plus notre civilisation économico-industrielle progresse, plus elle crée un environnement absolument névrotique, tendant à empêcher toute pensée sereine. Cette névrose collective est stimulée par des pseudo-informations sur le monde, souvent morbides, données en boucle par les médias, mais qui ne sont en fait que bruits de fond quasi-indéchiffrables. Ces dernières créent une curiosité malsaine, un sentiment désagréable d’impuissance, des craintes diffuses et des accoutumances aux choses les plus inacceptables. L’agressivité permanente d’images et de bruits, la passion pour des héros construits de toutes pièces par des médias avides d’audiences, la culture de la polémique juste pour le plaisir de polémiquer, le culte du « star système », la fascination portée à des despotes, les ragots, la montée en épingle de faux problèmes, l’addiction à l’argent et à toutes sortes d’autres drogues, l’emploi massif d’aide à l’existence tels les somnifères, les neuroleptiques, les tranquillisants et les antidépresseurs, tout cela ajouté à des professions souvent stressantes et peu gratifiantes, enlève toute velléité de pouvoir réfléchir calmement, de pouvoir écouter sa petite voix intérieure, de comprendre son prochain, son environnement. Notre psychisme est d’autant plus troublé que le hiatus est énorme entre les valeurs morales qui nous sont enseignées et notre tolérance à accepter des actes en totale opposition avec cette morale. Tout ceci conduit à ce qu’une grande proportion de la population soit dans un état quasi schizophrénique. Cette pathologie stresse encore plus les cerveaux. Elle empêche le respect2 de tout être et de toute chose. Quand le respect n’existe plus, alors il est automatiquement remplacé par la haine qui n’amène que souffrance et destruction. Si le respect conduit au respect, la haine conduit toujours à plus de haine, à plus de violence. C’est une spirale infernale. Cette haine est encore exacerbée par le fait qu’une grande proportion de la population mondiale est dans un état de pauvreté inacceptable, alors qu’une minorité la nargue avec des fortunes indécentes, rendant la situation encore plus explosive par sentiment d’injustice et d’humiliation.
En plus de cela, force est de reconnaître que ce n’est pas le propre de l’Homme civilisé de s’unir spontanément avec ses semblables dans le but de trouver une existence meilleure pour tous. Ça l’est encore moins quand il s’agit de l’existence d’une descendance indirecte et éloignée. Nous pensons en général que ce n’est pas notre rôle, mais celui de nos dirigeants. N’est-ce pas à eux d’améliorer l’existence de leurs subordonnés ? N’est-ce pas ce qu’ils nous ont promis et n’est-ce pas la raison pour laquelle nous les avons élus? Ne payons-nous pas d’ impôts pour cela ? C’est le refrain que j’entends continuellement.
Pris individuellement, le futur ne nous intéresse que par rapport à nos propres projets et non à ceux des autres et encore moins à ceux de la population mondiale. La très grande majorité d’entre nous formant la société de consommation, pris dans un tourbillon d’activités et de stress permanents, n’avons plus le temps de penser et de réfléchir à notre propre sort, à celui de nos enfants et encore moins à celui de nos petits-enfants. Dans le brouhaha d’informations contradictoires, nous préférons concentrer toute notre énergie, toute notre attention, toute notre intelligence, à saisir les meilleures opportunités pour améliorer notre immédiat, puis conseiller nos enfants d’en faire de même. N’a-t-on pas souvent entendu l’expression : « Nos enfants ? Eh bien, ils feront comme nous, ils se débrouilleront ».
Ceux, plus conscients des menaces qui pèsent sur leurs prochains ou sur leurs descendances, choisissent parfois un militantisme pur et dur, le plus souvent instrumentalisé par des individus ayant tout intérêt à créer un certain désordre ou faire passer en force le message qui leur convient. D’autres concernés mais ne se sentant pas capables, en tant qu’individu, à modifier le cours des choses, pratiquent la politique de l’autruche en invoquant l’aide de Dieu, de la Providence, du Destin, de la Science ou d’un quelconque gourou. La petite minorité d’idéalistes motivés pour faire des efforts est certes admirable, mais ne pèse pas assez, et de loin, pour incurver la fatale trajectoire.
Mettre au point une thérapie systémique pour éviter le pire à la population mondiale, si même cette thérapie existait, semble impossible. Deux raisons à cela. La première est que l’Homme moderne ne sait pas porter un regard dépassionné, réfléchi, rationnel et courageux sur sa propre société. Deuxièmement, à cause de nos orgueils, il est extrêmement difficile de nous mettre d’accord sur quoi que ce soit.
Certes, des recettes, « pour sauver la planète », selon l’expression des écologistes, sont pléthoriques et souvent fantaisistes. Mais, c’est plus fort que nous, seules celles qui apportent un avantage financier ou personnel sont retenues. Il est alors peu crédible de penser qu’un quelconque pouvoir philosophique, politique, économique, religieux, ou militaire puisse, par des campagnes de sensibilisation, d’éducation, de recommandations, voire par des mesures franchement coercitives, imposer suffisamment tôt des changements adéquats pour éviter le pire.
N’y aurait-il donc vraiment rien à faire devant le désastre annoncé ? Doit-on accepter notre destin sans rien entreprendre ? Je ne le pense pas. Mais ce qui est à faire ne devrait pas venir d’une autorité quelconque, mais bien du tréfonds de nous-même. Pour cela, nous devrions commencer par mettre notre cerveau en complète relaxation afin de comprendre et de mettre en pratique ce que les sages du monde entier n’ont cessé de nous répéter : préférer les richesses intérieures aux richesses matérielles. Cela revient à dire que nous devrions essayer de tendre vers le simple (voir annexe F de mon livre), l’humilité, le non-vouloir et ne rien imposer aux autres. Nous devrions être capables de pratiquer l’art difficile de jouir du moment présent, d’observer, d’écouter, d’échanger dans le respect2 de chacun, à être en phase avec l’Entité dont je parlais dans mon blog du 21 août 2022. Cette attitude devrait relaxer notre cerveau et dès lors, nous permettre d’accroître notre perception, nous aider à nous mettre en quelque sorte en osmose avec notre environnement. Cela devrait nous aider à mieux aimer la vie, les gens, les animaux, les plantes, tout cela sans rien en attendre, sans chercher à vouloir les transformer ou à les améliorer.
Si suffisamment d’entre nous parviennent à réaliser cette prouesse alors, sans rien brusquer, sans révolution, la transformation de notre organisation sociétale évoluera très probablement d’elle-même, paisiblement et tout naturellement vers des sociétés plus harmonieuses qu’actuellement. Si, c’est seulement vous qui y parvenez, vous vous sentirez plus en paix, votre existence sera plus épanouie et vous serez probablement mieux protégé(e) pour affronter les années difficiles qui s’annoncent à l’horizon. Je le reconnais, c’est plus vite dit que fait, mais ça vaut peut-être la peine d’essayer.
Pendant un certain temps, je vais cesser d’écrire des blogs régulièrement et de consacrer mon temps à discuter avec vous. En effet, je vous invite et même je vous encourage dès maintenant à poser vos questions, à exprimer votre avis et vos critiques, faire part de vos propres visions, diagnostics, propositions, lectures, etc. Pour cela, veuillez utiliser la partie réservée aux commentaires à la fin de chaque blog. Si, ce que vous avez à dire est plus long qu’une page, je vous propose alors d’utiliser la rubrique « Tribune ».
Merci d’avance !
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1 https://citations.ouest-france.fr/citation-jiddu-krishnamurti/vivre-demande-fait-beaucoup-amour-101192.html
2 Dans ce site le respect n’est pas à confondre avec la notion de politesse, de déférence ou de soumission aux règles de la société. Il signifie plutôt : essayer de comprendre au mieux de ses capacités, une personne, une croyance, un comportement, une théorie, un environnement naturel, sans idée préconçue et sans chercher à tout prix à les modifier, les transformer ou les exploiter. Si nous devons agir, alors le respect impose qu’on se soucie des conséquences d’un tel acte et être conscient de la délicatesse de cette opération qui demande tact et humilité.
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