Deux visions, deux stratégies pour le futur.
Jusqu’à présent, les écologistes adhèrent tous à une seule vision : celle imposée par le GIEC qui met en cause principalement l’utilisation des énergies fossiles sans vraiment remettre en cause notre paradigme économico-industriel. Sans rejeter aucun des fléaux dénoncés dans la vision consensuelle, je leur attribue une autre cause. Cette dernière ne serait pas tant liée aux gaz à effet de serre, mais plutôt à la somme des activités humaines passées et présentes soutenues par n’importe quelle énergie exogène. Contrairement à la vision consensuelle, ce ne serait pas la biosphère qui serait en danger et encore moins la planète, mais avant tout notre paradigme économico-industriel, colonne vertébrale de notre civilisation mondialisée. Ces deux visions n’ont en commun que la reconnaissance de l’altération du climat et de la biodiversité, mais entrevoient des prévisions très différentes pour l’avenir. Les stratégies pour les affronter sont par conséquent nécessairement différentes.
Bien sûr, chacun pense que sa vision est la bonne et la défend avec passion. C’est normal (voir blog du 18/05/23). Mais au niveau de la population, seule une petite partie d’entre-elle s’en intéresse, soit parce qu’elle pense que ce n’est pas de son ressort, soit qu’elle est suffisamment occupée par ses propres problèmes existentiels. Voir blog précédent. Ceux que l’avenir de l’humanité intéresse, adhéreront à l’une ou à l’autre de ces visions plus par mimétisme que par leur compréhension, laquelle demande du temps et des connaissances. Indubitablement, c’est celle qui aura le plus grand soutien financier, médiatique et politique qui emportera l’adhésion générale. Malheureusement pour l’ensemble de l’humanité, ce ne sera pas obligatoirement la bonne. Les générations futures pourraient alors amèrement regretter cet égoïsme des puissants qui font passer leurs intérêts immédiats avant les sérieux problèmes que pourraient rencontrer les futures générations.
Déontologiquement, les gouvernements dits démocratiques, soucieux de l’avenir de leur population, devraient demander à des institutions indépendantes d’établir quelle vision pour le futur est la plus vraisemblable. Peu de chance qu’il le fasse sans la pression du peuple. Avant d’aborder ce sujet, j’aimerais d’abord rappeler ce que j’ai compris de la vision consensuelle avant de résumer la mienne. Bien sûr, mon regard est quelque peu biaisé et c’est pourquoi, la valeur de chacune de ces visions devrait être établie par des entités neutres. Nous en reparlerons dans le prochain blog.
La vision consensuelle (voir blog du 01/03/23) est de prétendre que les gaz à effet de serre, issus de l’emploi massif d’énergies fossiles, sont la cause principale du réchauffement climatique, lui-même vu comme la cause de quasi tous nos problèmes écologiques. La stratégie pour le futur que recommande cette vision est inscrite dans l’Accord de Paris. Ce dernier incite à diminuer autant que possible et, le plus rapidement possible, l’utilisation des énergies fossiles, lesquelles ne devraient être utilisées plus qu’exceptionnellement après 2050. Par contre, à part quelques actions écologiques plus symboliques qu’efficaces, cette stratégie ne s’oppose pas au développement de notre paradigme économico-industriel et, se faisant, ne voit aucune contradiction avec la préservation de l’environnement. Certes, cette vision est consciente de la perte de la biodiversité, mais elle en accuse souvent les changements climatiques, quasiment jamais les activités humaines. Le problème de la perte de la biodiversité est résolu de la même manière que le problème du réchauffement climatique : il consiste à faire quelques actions ponctuelles bien médiatisées, par exemple en sauvant des baleines ou des coraux, mais surtout d’organiser des conférences internationales, appelées COP. Ces dernières mettent sur le papier toutes sortes de mesures ressemblant à la prière d’un religieux pour apaiser les angoisses de ses dévots (voir le blog du 01/03/23). De même rien, ou presque rien, n’est dit sur d’éventuelles pertes de ressources naturelles et minérales et de ses conséquences sur le futur de notre civilisation. Dans cette vision, il est implicitement admis que la croissance perpétuelle des activités humaines ne devrait pas trouver de limites, car le génie humain saura les dépasser.
La vision présentée dans ce site (voir blog du 07/03/23) est de prétendre que la préservation de notre environnement et la préservation de notre paradigme économico-industriel est totalement antinomique. Cette vision prétend encore que c’est l’ensemble des activités humaines passées et présentes, soutenues par les énergies utiles quelles que soient leurs provenances qui, en altérant la biosphère, conduit aux changements climatiques, à la perte de la biodiversité et à la raréfaction des ressources naturelles. De ces trois fléaux, le plus grand risque pour notre civilisation viendra (du moins à mes yeux) de la diminution des flux d’énergie et de matières dans un monde qui en aura toujours plus besoin. (Voir les blogs du 26/01/23 et du 03/02/23). A terme, les intenses activités humaines conduiront à un délitement progressif de notre paradigme économico-industriel, entraînant dans son sillage la fin de notre civilisation. Il faudra voir cela comme une contre-réaction de la Nature, en particulier de la biosphère*. Le génie humain sera bien incapable de stopper une force aussi grande (voir mon dernier blog). Dans cette vision, la stratégie pour l’avenir consiste alors à essayer de ralentir le plus possible le processus de délitement de notre civilisation économico-industrielle. L’espoir de cette stratégie est de nous donner suffisamment de temps afin que puisse émerger une nouvelle organisation sociétale de l’humanité. Pour cela, il faudra éviter que nos gouvernements prennent des décisions inadéquates ou des non-décisions risquant d’empirer le processus de délitement qui conduirait alors à un chaos social dont personne ne peut dire ce qui en ressortirait. Cette vision aura certainement beaucoup de difficulté à être acceptée, car elle ne rapporte rien et ne crée aucune richesse matérielle. Elle apportera par contre plus de richesses intérieures, mais ce sera quelque chose d’extrêmement difficile à faire accepter tant que nous n’arriverons pas à changer la manière de penser propre à notre paradigme sociétal.
Certes, il est difficile de prédire où, quand, et comment commencera le délitement de notre paradigme économico-industriel, si même il n’a pas déjà commencé dans certaines parties du globe sans que nous en ayons vraiment pris conscience. Il n’est pas non plus possible de prédire actuellement la manière dont se déroulera cette dégradation puisque cela tiendra pour beaucoup du comportement des populations, de leurs élites et de leurs dirigeants, avant et pendant le processus de délitement. (Voir blog du 03/02/23).
Les deux stratégies possibles pour assurer la survie de l’humanité ou du moins notre civilisation, ne sont pas complémentaires mais antagonistes. Par exemple, la stratégie de la vision consensuelle est de développer des centrales nucléaires parce que ces dernières produisent peu de CO2. Cela pourrait poser de très graves problèmes à l’humanité si, comme le suggère la thèse de ce site, notre civilisation est vouée à se déliter progressivement. En effet, ce délitement entraînera une baisse démographique continue par toutes sortes de mécanismes dont ceux venant de nos prédateurs naturels, les bactéries et les virus. Par exemple, lors d’une épidémie ou pandémie, nous n’aurons plus assez de personnel qualifié pour assurer la sécurité de ces centrales. Il en va de même pour les barrages hydroélectriques, les entrepôts de produits dangereux et toxiques, de la gestion des eaux sales et potables, de la gestion des mesures d’hygiène, etc. Ces catastrophes potentielles ne seront pas favorables à limiter les troubles sociaux, voire des guerres civiles qui menacent toujours les sociétés devenues hors de contrôle. Cela ne fera qu’aggraver les risques de destruction massive de populations tout en aggravant encore plus l’état de la biosphère. En conséquence, ni le climat, ni la biodiversité ne s’amélioreront pendant cette période rendant, la survie de notre espèce et de beaucoup d’autres, toujours plus précaires.
Il est fort probable que le délitement de notre paradigme économico-industriel, et donc de notre civilisation mondialisée, ne se fasse pas en même temps et avec la même intensité dans le monde. Pour une région donnée, la dégradation de ce paradigme ressemblera plutôt à l’état de santé d’un malade atteint d’une grave maladie chronique. Son activité aura des hauts et des bas, des moments d’amélioration avec des reprises d’espoir, suivies de rechute et ainsi de suite jusqu’à sa mort. Dans le cas de notre civilisation mondialisée, la durée du processus de dégradation complète pourrait prendre un ou deux siècles, laissant suffisamment de temps aux humains de s’organiser et s’adapter aux changements.
Bien cernée et bien gérée, cette période de transition pourrait être une période stimulante de renouveau, permettant à chacune et à chacun de participer à la plus belle, la plus longue et la plus étonnante évolution pacifique de l’histoire de l’humanité. En effet, jamais il n’aura été donné à l’humanité un objectif aussi noble et aussi passionnant pour développer un, ou plusieurs nouveaux modèles sociétaux, spécifiques à leur région, plus en phase avec les aspirations de chacune et de chacun, mais toujours en accord avec les lois fondamentales de la Nature.
Par contre, si l’orgueil, l’égoïsme et le non-respect de toute chose et de toute personne, malheureusement spécifique à notre façon d’être et de penser actuellement, devaient encore persister au sein de notre civilisation, voire s’aggraver encore, alors le processus du délitement sera très probablement beaucoup plus rapide et risque d’être un moment très difficile à passer.
En conséquence, les gouvernements et les associations écologistes, sérieusement intéressés par le devenir de l’espèce humaine et des autres espèces, seraient bien inspirés d’entreprendre au plus vite des travaux honnêtes et multiples afin de déterminer laquelle des deux visions décrites ci-dessus est la plus plausible. Fort de ces résultats, chaque pays pourra essayer de s’organiser à sa façon pour protéger au mieux leur population. Nous verrons dans le prochain blog comment déterminer laquelle des deux visions est la plus vraisemblable.
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* D’une manière générale, il semblerait que seules les grandes perturbations de la biosphère puissent changer fondamentalement l’organisation sociétale humaine. Par exemple, la fin de la dernière glaciation, provoquée par un réchauffement climatique naturel et cyclique, a entraîné une modification importante de la biosphère, obligeant les humains à changer leur mode d’existence. Ils sont ainsi passés du paléolithique au mésolithique, puis du mésolithique au néolithique et enfin à la civilisation, il y a quelques milliers d’années. De nos jours, c’est le contraire. C’est le mode d’existence des humains qui a modifié notablement la biosphère laquelle, pour maintenir son équilibre instable à l’intérieur de « sa surface de sustentation » va contraindre à restreindre notablement les activités humaines. Ainsi, de même qu’il y a quelques milliers d’années, l’humanité sera une fois de plus obligée de s’adapter à ces changements cette fois auto infligés. A nouveau, elle devra modifier une fois de plus son organisation sociétale.
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