Énergie endogène humaine et énergie exogène aux humains, mais utilisée par ces derniers.
Première remarque. Les valeurs données ici ne sont que des ordres de grandeur et rien de plus. Leurs incertitudes dépassent probablement les 100 %. Faire de la précision sur ce sujet demanderait beaucoup d’effort, sans que cela ne nous apporte beaucoup plus d’informations.
Deuxième remarque : Classiquement, la science mesure l’énergie endogène en calorie. Ce faisant, elle assimile un organisme biologique à une machine thermique, ce qui n’est pas vraiment le cas. L’échange d’énergie et de matière qui se fait entre un individu et son environnement naturel ne peut pas être assimilé à une telle machine. En effet, dans notre organisme, de la matière, le plus souvent de nature biologique, est transformée en énergie et en d’autres formes de matières par une merveilleuse machinerie que nous appelons le système digestif. Les échanges matière-énergie qui se font dans ce système sont très éloignés des processus d’échanges thermiques, c’est-à-dire de collisions désordonnées de molécules entre elles. Cependant, nous n’avons ni unité, ni théorie pour décrire finement ce processus et, de là, le quantifier. Dès lors, pour continuer notre discussion, nous accepterons l’unité de la calorie, faute de mieux.
Énergie endogène1.
Pour maintenir en fonction le merveilleux système que représente notre organisme au repos, il lui faut un flux d’énergie minimum, appelé en physiologie : métabolisme de base.
Prenons le cas d’un homme adulte de 70 kg. Pour maintenir son métabolisme de base, la science a calculé qu’il devrait recevoir un flux d’énergie minimum de l’ordre de 1500 kcal/jour. Cela représente une puissance moyenne de 72 Watts ou un débit d’énergie journalier de 1728 Wh/j.
Où l’organisme humain va-t-il trouver l’énergie et la matière dans la biosphère pour entretenir son métabolisme de base ? Comme tous les organismes biologiques, au travers du magnifique processus physico-chimique que constitue son écosystème, siège de la chaîne alimentaire, régie par la biosphère. Si personne ne le fait pour lui, l’Homme devra effectuer un travail pour se nourrir. Il lui faudra trouver dans la chaîne alimentaire une énergie supérieure à celle requise par son seul métabolisme de base. Pour cela, l’Homme primitif chassait, pêchait et cueillait pour obtenir sa nourriture. Pour un humain civilisé moderne, il doit trouver un emploi rémunéré afin d’obtenir sa nourriture sur le marché. Tout le monde, civilisé ou non, doit encore faire d’autres travaux pour se protéger contre les agressions extérieures (pluie, neige, températures extrêmes, tempêtes… et les prédateurs biologiques).
Il est admis que la quantité de kilocalories absorbée par un humain actif est en moyenne de l’ordre de 2150 kcal/jour. Puisque 1500 kcal/jour sont réservées à son seul métabolisme de base, il lui reste logiquement 650 kcal/jour de disponible pour accomplir un certain travail. C’est ce que nous l’appellerons l’énergie endogène. Nous feronsl’hypothèse que cette valeur de 650 kcal/jour représente l’énergie endogène d’un humain type, représentatif des hommes et des femmes actifs dans les sociétés complexes mondialisées.
Estimation de la quantité d’énergie endogène qu’un individu actif pourrait allouer chaque année au développement de sa société.
Supposons qu’un individu-type doive consacrer 400 kcal/jour pour obtenir sa propre nourriture, s’occuper des enfants et de ses aînés ainsi qu’effectuer les autres travaux personnels de la vie courante. Théoriquement, les 250 kcal/jour restant de son énergie endogène (650-400 kcal/j) pourraient être utilisés pour le développement de sa communauté. On peut calculer que cette valeur correspond à 106 kWh / an.
Acceptons alors que 100 kWh /an soit le niveau moyen d’énergie endogène qu’un individu actif pourrait théoriquement apporter au développement de sa communauté.
Énergie exogène2.
Bien avant l’ère industrielle, l’ingéniosité du cerveau humain et son efficacité à améliorer ses conditions d’existence ont permis de multiplier son énergie endogène en puisant de l’énergie dans des sources d’énergies issues de l’exploitation :
de l’énergie animale
du vent et des chutes d’eau
des rayons du soleil
des esclaves humains (prisonniers de guerre, réfugiés, etc.)
de la biomasse et du charbon
Avec l’aide de ces apports énergétiques exogènes, les individus de l’ère préindustrielle ont pu multiplier leur énergie endogène moyenne par un facteur que j’estime entre 5 et 10, soit entre 500 et 1000 kWh/an et par personne active. Retenons, pour la suite de la discussion, la valeur très approximative de 1000 kWh/an.
Juste avant l’ère industrielle, il n’y avait guère plus de 100 millions de personnes actives qui participaient au développement de la civilisation occidentale. Ainsi, le flux total d’énergie consacré à la croissance et au fonctionnement de la civilisation était, à l’époque, de l’ordre de 100 TWh/an (100 millions multipliés par 1000 kWh/an). De nos jours, elle est dans le monde de l’ordre de 100’000 TWh/an, soit mille fois plus élevée.
Ce facteur 1000 (qui, rappelons-le n’est qu’un ordre de grandeur grossier) provient de la combinaison de l’expansion géographique de la civilisation dans le monde, de l’accroissement démographique des populations et de l’augmentation des dépenses énergétiques exogènes de chaque individu. Ainsi, en l’espace très court d’environ deux siècles, l’espèce humaine a multiplié sa population par un facteur de l’ordre de 7 à 8 et ses activités annuelles (pour la grande majorité nuisible à la biosphère) par un facteur de l’ordre de 100 000. Il est très difficile de s’imaginer ce que cela représente.
Au cours de ces 6 ou 7 décennies, il a été observé une nette diminution de la population de nombreuses espèces de la chaîne alimentaire. A cause de quoi ? Bien sûr, à cause de nous, à cause de notre paradigme économico-industriel (chapitre 6 de mon livre), à cause de notre insatisfaction permanente qui nous oblige à croître constamment, non seulement en nombre d’individus, mais aussi en activités soutenues par les énergies exogènes. Mais, comme il n’est pas possible de créer de l’énergie et de la matière à partir de rien (voir chapitre 9 de mon livre), ces flux doivent être pris aux dépens de ceux nécessaires à l’existence d’autres espèces qui peuplent notre biosphère. Ces dernières, ne recevant plus l’énergie endogène pour leur survie, ne peuvent que décroître en nombre, ou carrément disparaître.
L’observation et l’histoire nous disent que chaque fois qu’une espèce prend trop de place dans la biosphère, cette dernière réagit en ramenant le nombre d’individus de cette espèce à sa « portion congrue ». En clair, cela veut dire que l’abus d’utilisation massive d’énergie et de matière par l’Homme devrait, à terme, ramener le nombre de sa population au niveau de ce qu’il était avant leur utilisation massive et même probablement atteindre un niveau encore plus bas.
Et devant ce désastre visible et évident, que font les scientifiques ? Ils s’intéressent au fait que pendant cette période d’exaction humaine envers la biosphère, l’atmosphère s’est enrichie d’une à deux molécules de CO2 sur 10’000 autres qui la composent. Cela représente un changement de sa formule chimique d’environ 0,02%. N’est-ce pas un peu insignifiant en comparaison avec l’importance des modifications biosphériques dues à l’Homme ? Nous savons tous que dans la nature tout est lié. Si donc nous modifions la biosphère, le climat qui lui est lié doit aussi se modifier.
Quelle est la raison pour laquelle le bon sens est si peu développé chez les scientifiques ? Pour ma part, je pense que cette qualité n’est pas demandée par notre système économico-industriel. Ce que ce système désire de ses étudiants en science, c’est qu’ils soient performants, qu’ils exécutent au mieux ce qui leur est demandé, sans remettre en question l’objectif de leurs travaux. Quant à l’individu de formation scientifique, il n’est pas différent des autres travailleurs intellectuels. Ils ne pensent en général qu’à sa carrière, aux avantages financiers ou de prestige que cette dernière peut lui procurer.
C’est très dommage pour tout le monde.
_______________________________
1 https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/endog%C3%A8ne/29340
2 https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/exog%C3%A8ne/32168

Laisser un commentaire